CEMAC : Affaire BEAC contre CAMPOST ; des leçons juridiques à tirer ?

Par correspondances et communiqués, la Banque des Etats d’Afrique Centrale (BEAC) et la Cameroon Postal Service (CAMPOST) révèlent une “crise” qui instille quelques enseignements juridiques…

En date du 30 mars 2020, le  Directeur  Général  de la  Cameroon  Postal Services (CAMPOST) a adressé une  demande  d’autorisation  d’un  système  de  règlement  et  de compensation à la BEAC qui a la responsabilité de réguler cette activité.

Un jour après le dépôt de la demande, le ministère des postes et télécommunications procède au lancement officiel de la plateforme du Switch du Système de règlement et compensation des transactions monétiques au Cameroun.

Arguant de ce qu’elle n’a pas eu le temps nécessaire d’étudier le dossier de demande déposé par l’entreprise camerounaise, la BEAC avance également l’argument de l’irrégularité dudit dossier pour non usage de langue officielle de travail de la BEAC et de la COBAC.

Ce faisant, la Banque centrale dans son rôle de régulation du marché des services de paiement semble vouloir rappeler deux choses au minimum. 

Les demandes d’agrément et d’autorisation formulées auprès de la BEAC et de la COBAC doivent se faire en français ?

Dans sa mise au point du 20 avril 2020, la BEAC précise que : « conformément  à l’usage  du français  comme  langue  de travail  à la  BEAC et pour des raisons  d’efficacité  ainsi  que  de célérité dans  l’examen  du dossier technique présenté,  il  a été  demandé  à la CAMPOST  de  fournir  la  version en langue  française  dudit dossier.  La Banque  Centrale  tient à réaffirmer  avec force  que  cette  requête n’est nullement un motif  de  rejet  de la  demande  introduite  par  la  CAMPOST ».

Il est vrai que cette précision intervient après qu’une fuite sur les réseaux sociaux 5 jours plutôt laisse dire à la BEAC que  le dossier de la Campost ne pouvait être examiné en l’état pour cause d’irrégularité de forme. Le motif étant pris de ce que « l’intégralité du dossier de demande a été rédigée en langue anglaise, et non pas en langue française qui est la langue de travail de la BEAC et de la COBAC ». La Banque centrale a toutefois pris le soin de préciser que le rejet pour irrégularité n’empêchait pas une nouvelle introduction de dossier de demande.

Un recours à l’article 59 du Traité de la CEMAC indique que les langues de travail de la CEMAC sont le français, l’anglais, l’espagnol et l’arabe.

Dès lors, il y’a lieu de penser que l’anglais fait bien partie des langues officielles devant être usitées par les autorités communautaires. Au demeurant, la BEAC le reconnait dans sa mise au point.

Il est interdit de poursuivre une activité conditionnée par un agrément avant l’examen de la demande d’agrément

La BEAC reproche par ailleurs à la Campost le fait que  le  31  mars  2020,  par  voie de presse,  elle  a été informée  du lancement  officiel du switch du  système  de compensation  et  de règlement  des transactions  électroniques,  géré par la  CAMPOST. 

Ce lancement  officiel est  en  effet  intervenu  24 heures  avant que  la demande  d’autorisation  introduite  par  la  CAMPOST  ne soit  parvenue  à la  BEAC,  en l’absence  des autorisations  et  habilitations  nécessaires  préalables. Cette inauguration intervenait au moment où la BEAC indiquait déjà que « dans l’attente de l’introduction d’une nouvelle demande d’autorisation recevable et de la délivrance éventuelle par la BEAC et la Cobac, la BEAC enjoint à la Campost de suspendre toutes les opérations et actions visant au démarrage du traitement de la compensation et du règlement des opérations par ledit système de paiement dont le lancement officiel a été réalisé en violation des textes communautaires ».

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Rappelons que le switch est anglicisme qui renvoie à un « commutateur » ou « interrupteur » en français. En informatique, le switch désigne un commutateur réseau, équipement ou appareil qui permet l’interconnexion d’appareils communicants, terminaux, ordinateurs, serveurs, périphériques reliés à un même réseau physique.

Dans le cas du Cameroun et de la Campost, l’idée consiste à mettre en place une plateforme unifiée d’agrégation des communications électroniques, de faciliter l’identification et la localisation instantanée des utilisateurs des services financiers mobiles pour lutter contre le financement du terrorisme e le blanchiment d’argent et aussi de permettre la traçabilité et le stockage des données, à l’effet de collecter les taxes et les impôts sur touts les transactions financières numériques. Et les clients devront avoir accès à la plateforme en composant le code unique ?237?.

DMF