CEDEAO : Une nouvelle directive portant harmonisation de la TVA dans les Etats-parties


Par la Rédaction de DMF |


 La 90ème   session ordinaire du conseil des ministres de la CEDEAO qui s’est tenue les 6 et 7 juillet 2023 a adopté la Directive C/DIR.8/07/23 portant harmonisation des législations des Etats-membres de la CEDEAO en matière de taxe sur la valeur ajoutée (TVA).

CEDEAO

Ce nouveau texte vient abroger les dispositions que la Commission de la CEDEAO avait prise en 2009 dans une Directive sur l’harmonisation de la Taxe sur la Valeur Ajoutée (TVA). Cette Directive avait pour ambition d’encadrer les axes comme le champ d’application, le champ des exonérations, les taux, les droits à déduction, etc.

Comme indiqué, ce nouveau texte a pour ambition que l'harmonisation des législations fiscales contribuera « à la cohérence des systèmes internes de taxation, à l'égalité du traitement des opérateurs au sein de la Communauté, à une mobilisation durable des ressources intérieures dans les Etats Membres » et « qu'il est dans l'intérêt de la Communauté d'agir en solidarité en rapprochant les systèmes de Taxe sur la Valeur Ajoutée pour accroitre ses performances, éviter les pratiques de concurrence déloyale dommageables, conformément aux objectifs du Programme de Transition fiscale au sein de la Communauté ».

Au reste, dans cette directive, les opérations imposables soumises à la taxe sur la valeur ajoutée sont « les opérations relevant d'une activité économique et effectuées à titre onéreux, à l'intérieur d'un État membre, par toute personne physique ou morale se livrant, habituellement ou occasionnellement, et d'une manière indépendante, à des actes relevant d'une activité industrielle, commerciale, non commerciale, agricole, extractive ou artisanale, à l’exclusion des activités salariées. » détaille l’article 2.

Aux termes de l’article 5 : « chaque État membre de la CEDEAO détermine le seuil de chiffre d'affaires annuel hors TVA à partir duquel toute personne physique ou morale est assujettie à la TVA, selon le régime du réel, quelle que soit la forme juridique ou la nature des activités exercées. Ce seuil est fixé en fonction de la structure économique de chaque État membre. Toutefois, chaque État a la faculté d'assujettir d'office à la TVA les personnes physiques ou morales ainsi que les personnes exerçant une activité non commerciale. »

PERSONNES ET OPERATIONS CONCERNEES

Sont assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée au sens de la Directive CEDEAO, les personnes physiques ou morales, y compris les collectivités publiques et les organismes de droit public, réalisant des opérations imposables. Ces opérations sont : 

  • Les importations : par importation, il faut entendre le franchissement du cordon douanier d'un État membre ;
  • Les livraisons de biens : par livraison de biens, il faut entendre toute opération ayant pour effet de transférer à titre onéreux la propriété des biens corporels à des tiers ;
  • Les livraisons à soi-même de biens corporels meubles et immeubles par des personnes physiques ou morales pour leurs besoins, pour ceux de leur exploitation ou pour être cédés à titre gratuit au profit des tiers ;
  • Les travaux immobiliers : par travaux immobiliers, il faut entendre tous les travaux exécutés par les différents corp5 de métier participant à la construction, à l'entretien et à la réparation de bâtiments et d'ouvrages immobiliers, les travaux publics, les travaux de chaudronnerie, de bâtiments et de construction métallique, les travaux de démolition, tes travaux accessoires ou préliminaires à des travaux immobiliers, y compris tes marchés publics à financement extérieur ;
  • Les opérations de transformation de produits agricoles ou de la pêche et toutes opérations, même réalisées par tes agriculteurs, les pêcheurs qui, en raison de leur importance sont assimilées à celles qui sont exercées par des industriels ou des commerçants, que ces opérations constituent ou non le prolongement de l'activité agricole ou de la pêche ;
  • Les prestations de services : ce sont toutes les opérations autres que celles énumérées ci-dessus, effectuées entre deux personnes juridiquement distinctes et comportant une contrepartie en numéraires ou en nature ;
  • Les prestations de services à soi-même : elles s'entendent des services que tes assujettis réalisent, soit pour tes besoins de Ieur entreprise, soit pour d'autres besoins dans le cadre normal de leur activité ;
  • Les ventes de biens d'occasion faites par les professionnels ;
  • Les cessions d'éléments d'actifs non compris dans la liste des biens exonérés dans chaque État membre ;
  • Les locations de terrains non aménagés et de locaux nus effectuées par des professionnels de l'immobilier ;
  • Les subventions à caractère commercial quelle qu'en soit la nature, perçues par les assujettis à raison de Ieur activité imposable ;
  • Les remises de dettes et les abandons de créances ;
  • Le raffinage, la distribution et la mise à la consommation des produits pétroliers, à l'exclusion de la revente au détail de ces produits ;
  • Les remboursements de frais autres que les débours au sens de l'article 26 engagés par un fournisseur pour le compte de son client et
  • D’une manière générale, toute activité lucrative autre que salariée ou toutes opérations qui ne seraient pas expressément exclues du champ d'application par la présente Directive.

En tout état de cause, il est laissé à chaque État membre de la CEDEAO le soin de fixer le taux de droit commun de la TVA applicable aux opérations taxables avec un minimum de 10 %. Toutefois, les États Membres ont la faculté de fixer un taux réduit avec un minimum de 5% sur une liste nationale limitée à 10 produits.

CRITIQUES

Pour certains experts, cette nouvelle directive TVA n’est pas un atout les Etats membres en l’absence d’une liste limitative des exonérations ainsi que des opérations imposables sur la marge ou des taux réduits. Cette situation ouvre la porte à la concurrence fiscale entre les Etats membres et des risques de déperdition fiscale.

De même, il est reproché au texte d’ignorer les retenues de TVA sur les marchés publics avec pour corollaire l’aggravation des difficultés de remboursement des crédits de TVA et la pénalisation des entreprises nationales au bénéfice des entreprises étrangères. La possibilité de déduction de la TVA sur les produits pétroliers est en outre présenté comme susceptible de faire accroître les fraudes autant que pour le remboursement des crédits de TVA, aucune distinction n’est faite entre les assujettis vertueux et les autres non vertueux. De plus, l’absence d'auto-liquidation de la TVA à l'importation sur les biens d'équipement peut pousser les entreprises à ne pas être exemplaires.