OHADA : Le Burkina Faso et le Mali dénoncent la désignation du dernier secrétaire permanent


Par Daniel EBOGO |


Par un Communiqué (Communiqué conjoint n°002) publié le 9 septembre 2023, le Burkina Faso et la République du Mali dénoncent certaines décisions de l'Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires. Représentés par leurs porte-paroles à savoir le Ministre de la Communication, de la Culture, des Arts et du Tourisme pour le Mali et le Ministre d'Etat, Ministre de l'Administration territoriale et de la Décentralisation pour le Burkina Faso, ces Etats-membres de l’OHADA (tous les deux traversés par des transitions faisant suite à des coups d’Etat militaires) décrient la teneur des décisions prises lors de la dernière réunion du Conseil des Ministres de l'OHADA.

Ce qui semble faire problème est logé dans l'issue de la 55ème session du Conseil des Ministres de l'Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA) tenue à Kinshasa en Publique Démocratique du Congo, les 29 et 30 Août 2023. Le communiqué des porte-paroles fait état d'entrée de jeu d'une "profonde stupéfaction" de ces Etats suite au compte-rendu. 

Selon cette sortie, ils indiquent que "contrairement au récit mentionné dans ce compte-rendu, les représentants du Burkina Faso et du Mali, tous deux Ministres en charge de la Justice, ont évoqué plusieurs griefs et manquements violant les règles de fonctionnement de l'OHADA, dans le cadre du processus de recrutement entaché de vices de forme et de fond, en vue de pourvoir au poste de Secrétaire permanent et à d'autres postes internationaux."

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Pour les porte-paroles, " l'une des causes profondes de ces recrutements frauduleux, est le chantage opéré par l'Agence Française de Développement, qui a menacé ouvertement de retirer son financement, au cas où, des candidats qui lui sont favorables ne seraient pas choisis. C'est ainsi que de nombreuses manoeuvres illégales, consistant à retirer abusivement la parole aux représentants du Burkina Faso et du Mali ou même à déconnecter le système de visio-conférence à d'autres participants, ont été déployées au cours des travaux. Exaspérés par ces manoeuvres déloyales et las de n'avoir pas été entendus, les représentants du Burkina Faso et du Mali se sont retirés de la salle."

A la suite de ces affirmations, les ministres des gouvernements de Transition du Burkina Faso et du Mali ont expliqué qu'ils dénoncent "l'occultation du communiqué de ces faits graves et refusent de participer à une mascarade qui viole la souveraineté des Etats africains et décrédibilisent l'OHADA."

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De manière tranchée, ils soulignent qu'il y a eu là des irrégularités, violations des textes et conflits d'intérêts manifestes, qui ont entaché le processus de recrutement, lors de la 55ème session du Conseil des Ministres et demandent à la suspension du processus d'installation des personnels irrégulièrement et illégalement recrutés non pas sans reprendre le Compte-rendu de la Réunion du Conseil des Ministres de la 55ème session du Conseil des Ministres, en vue de mentionner fidèlement le déroulement des travaux, notamment les protestations du Burkina Faso et du Mali.

Pour finir, ils demandent " à la Conférence des Chefs d'Etat et de gouvernement de l'OHADA de se saisir urgemment de la situation", faute de quoi "les conséquences de droit, en cas de passage en force" seront tirées. 

En rappel, même si cela n'est pas souhaité pour cette institution d'harmonisation du droit des affaires, ces deux pays disposent de plusieurs droits reconnus dans le Traité de Port-Louis modifié à Québec en 2008. En effet, L'article 56 dudit Traité OHADA prévoit que tout différend qui pourrait surgir entre les Etats-Parties quant à son interprétation ou à son application et qui ne serait pas résolu à l’amiable peut être porté par un Etat Partie devant la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage. Allant plus loin, l'article 62 dispose quant à lui que le Traité fondateur de l'OHADA a une durée illimitée et ne peut, en tout état de cause, être dénoncé avant dix années à partir de la date de son entrée en vigueur. Le landerneau des affaires en Afrique croise les doigts pour le dénouement "amiable" de cette situation inédite !